[GN 2012] Uther Dol

[Tenebrox]

Le cachot d’Uther puait la pisse et la merde. Impossible de dire depuis combien de temps il était enfermé, dans sa cellule entre ces quatre murs en pierres taillées sans barreaux, et sans lumière. Seul une porte en bois et en fer venait briser la monotonie de ces lieux. Prisonnier Uther avait tout le temps de penser. Le plus fréquemment il s’agissait de ses souvenirs des jours glorieux ou il était encore un féroce seigneur de guerre menant ses forces contre la Darkmoon. Cela le torturait d’autant plus qu’il était maintenant un moins que rien et qu’il avait tout perdu, son honneur, sa force, ses hommes, son domaine… tout !

Une des autres tortures de la prison est la perte de la notion du temps. Et après quelques jours de ce traitement vous ne faites plus attention qu’à la faim et au froid, qui vous torturent, sans répits. Le sommeil vient à vous manquer à force de somnoler sur un mince tas de paille humide et moisi. Après quelques temps ainsi, le sommeil ne vous soulage plus, il vous joue des tours. Vous ne savez plus si vous dormez ou pas, perdu dans un monde où la réalité n’est plus dissociable du rêve, ou du cauchemar torturé par vos doutes et vos propres questions. Si ce séjour se prolonge trop, à la fin c’est la raison qui vous quitte.

Tel était l’objectif de ses geôliers, lui faire perdre la raison. La Darkmoon avait en tête d’apporter un soin particulier à sa détention, un traitement de faveur en quelque sorte. Ils avaient privilégiés l’isolation aux interrogatoires musclés du début, juste après sa capture. Ils voulaient le briser, et c’était en bonne voie. Mais dans son esprit presque éteint, Uther conservait malgré tout une part de raison bien encrée au fond de son âme, quelque chose d’inaltérable, une réalité gravée au fer rouge, une flamme que seul sa mort pourrait éteindre : la vengeance. Oui un jour il sortirait de cet endroit maudit et il se vengerait de ses geôliers tout comme de ceux qui l’avaient abandonné.

Il en était persuadé. Certains de ses sois disant alliées l’avaient vendu. Sinon comment aurait il pû être capturé aussi facilement ? Certes son armée avait grandement souffert de la guerre, mais leur moral et leur détermination était encore intacts. Tous voulaient la mort de ces chiens galeux. Mais il savait qu’il pouvait encore compter sur certains dans l’Alliance. Il leur avait si souvent sauver la mise que tous ne pouvait l’avoir abandonné. Il en été sûr, un jour il pourra se venger.

Alors, la porte de la cellule s’ouvrit, Uther dans un cri de stupeur se débâtit dans ses chaines pour tenter de cacher ses yeux de la lumière des torches. La lumière qu’il n’avait pas vu depuis longtemps lui bléssait les yeux l’aveuglant. Une voix rocailleuse qui lui parla :
«Je suis Gors, Oreille de Syspéole. Tu as été reconnu coupable de meurtre, blasphème, hérésie, et de haute trahison, en réponse à tes abjectes crimes, l’autorité religieuse t’as condamné à la mort par éviscération. »
Le moine resta un moment impassible puis repris :
« Dans son immense mansuétude, Syspéole et son représentant Mollock te donne par mon intermédiaire la possibilité de confesser tes crimes car je suis son Oreille. Reconnais devant moi tes pêchers et ta mort sera brève et sans douleur. Dans tous les cas, tu seras un exemple pour ceux qui osent s’élever contre la volonté de nôtre Seigneur.»
Alors que l’éblouissement faisait doucement place au sourire sardonique du confesseur, Uther puisa au plus profond de lui, cette flamme inextinguible qui subsistait : « la Haine ». Celle de la Croisade noire qui lui avait tout pris. Celle des traitres qui l’avaient livré aux moines noires. Celle de ses geôliers, de ses bourreaux, de la Darkmoon. Le temps qu’il lui restait à vivre serait voué à la haine car seule cette partie de lui était intacte.
Uther toisa le moine et afficha un sourire fou. Une nouvelle énergie se déversait en lui, il trouva assez de ressources et de salive pour lui cracher à la figure et se mit à rire doucement. Le moine, grimaça de colère et la machoire crispée dit :
« Tu vas souffrir Dhol, fait moi confiance ! »
Puis il referma la lourde porte de la cellule.

Uther pensa : je ne suis pas encore mort, Moinillon… Ce genre d’histoire ne finit pas ainsi.